Roman "jeunes adultes"

Rien dire de Bernard Friot

Rien dire

Auteur : Bernard Friot
78 p.

Actes Sud junior, 2014 (D’une seule voix)

résumé A l’occasion d’un stage, Brahim passe une épreuve de mise en situation. Mais parler de soi en public représente pour l’adolescent une grande difficulté, et le plonge dans une réflexion sur la communication et la soif de reconnaissance.
cequejenaipensé Dans le cadre d’un stage de préparation au bac de français, Brahim, adolescent traversé par la timidité, se retrouve confronté à une épreuve redoutable : parler de soi devant les autres. Ce point de départ, simple en apparence, est le fil conducteur de cette nouvelle de Bernard Friot, publié dans une collection incontournable pour moi (ces jours ci vous la voyez pas mal sur mon blog!). Loin d’être anodin, ce moment de mise à nu va plonger Brahim dans une introspection poignante sur la communication, la quête de reconnaissance, et les failles identitaires qui le tiraillent.
Lors de ce stage, chaque soir, une professeure met en place un jeu d’improvisation d’une simplicité désarmante : s’asseoir, seul, face au groupe, et parler de soi jusqu’à ce qu’une bougie s’éteigne. Pour Brahim, l’idée est terrifiante :la difficulté à se livrer, à trouver les mots justes pour exprimer un « moi » encore en construction. Alors, la veille de sa propre intervention, Brahim imagine ce qu’il pourrait dire, faire…
Brahim se lance dans son imaginaire. Il choisit d’abord la façade rassurante d’une passion : l’Allemagne, sa langue, et surtout, ses délicieuses pâtisseries. Le Stollen, en premier lieu, égrenant des souvenirs de vacances chez son oncle à Dresde. Une manière comme une autre de gagner du temps ?
Mais les mots sont une rivière impétueuse. Emporté par son propre récit, Brahim dérive vers des eaux plus profondes, plus intimes. Il évoque son statut, de ses origines.
La colère sourde monte, le ton change. L’armure de la retenue se fissure, laissant entrevoir une sensibilité à vif.
Bernard Friot réussit avec une finesse remarquable à capter ce moment de bascule. D’une voix singulière, il donne corps à la parole libérée d’un adolescent longtemps silencieux. L’émotion est palpable, les confidences touchantes, et le malaise lié à ses origines résonne avec une justesse poignante.
Rien dire explore ce qui est essentiel et pourtant si difficile à exprimer : le poids du conformisme, l’apprentissage d’une langue, les remarques blessantes, le racisme ordinaire, le déracinement et les deuils tus. À travers les pensées de Brahim, Friot met en lumière l’ampleur du silence assourdissant de ce que ressent l’adolescent au quotidien. Un cri du coeur. Un appel à la reconnaissance..

Mais osera-t-il dire à voix haute ce qu’il ressent au plus profond de lui ? ce qu’il vient de nous partager entre ces pages ?

en bref Un court texte à la densité émotionnelle forte. Une exploration sensible de l’âme d’un adolescent en quête d’identité.

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