Dans la collection « D’une seule voix », qui ne cesse de me surprendre par la puissance de ses récits courts : Au moins un d’Irène Cohen-Jancaen fait partie. Ce roman nous plonge dans le quotidien de Marie, une jeune femme apparemment ordinaire, dont la quête de soi résonne avec une force inattendue.
Dès le premier jour au Centre d’appels, Marie est confrontée aux rouages implacables du télémarketing : des phrases calibrées, un « sourire qui s’entend » obligatoire, une docilité à toute épreuve. Mais c’est quand on lui impose de changer de nom pour devenir « Sonia » que Marie sent quelque chose en elle vaciller. Cette négation de son identité, même minime, devient le grain de sable qui va enrayer la machine. Pourtant, le chemin vers la rébellion est souvent long, pavé de doutes et d’obstacles intérieurs.
Le choix d’Irène Cohen-Janca de mettre en scène une héroïne comme Marie est tout sauf banal. Marie n’aspire qu’à une chose : être coiffeuse. Un rêve simple, en apparence, mais dont la réalisation semble pourtant hors de portée. Et c’est là que réside la force du roman : il nous fait comprendre qu’un rêve, quelle que soit sa taille, n’est jamais facile à atteindre sans une volonté inébranlable. La taille du rêve importe moins que l’intensité de celui qui le porte.
La deuxième partie du roman marque un tournant radical. Le rythme s’accélère, l’intensité monte d’un cran. C’est le moment où Marie, enfin, se rebelle. Elle passe des mots à l’acte, refusant de s’oublier, de se laisser déposséder de son identité. Et c’est là qu’intervient le personnage lumineux de Madame « Au moins un ». Cette ancienne professeure de français, qui encourageait ses élèves à apprendre un poème par cœur, offre à Marie la clé d’un refuge intérieur. Un poème pour soi, comme un abri où se blottir, n’importe où, n’importe quand.
Ce poème devient le symbole d’une liberté inaliénable, d’une résistance silencieuse mais puissante. Il incarne la capacité de Marie à se souvenir d’elle-même, à se reconnecter à son essence.


