Roman

Les enfants de l’eau noire de Joe R. Lansdale

couv73591958Titre : Les enfants de l’eau noire

Titre original : Edge of dark water

Auteur : Joe R. Lansdale

trad. de l’anglais (etats-Unis) par Bernard Blanc

351 p.

Denoël, 2015

Résumé :

Texas, années 1930. Élevée dans la misère au bord de la Sabine, qui s’écoule jusqu’aux bayous de Louisiane, May Linn, jolie fille de seize ans, rêve de devenir star de cinéma. Un songe qui s’achève brutalement lorsqu’on repêche dans le fleuve son cadavre mutilé. Ses jeunes amis Sue Ellen, Terry et Jinx, en rupture familiale, décident alors de l’incinérer et d’emporter ses cendres à Hollywood. May Linn ne sera jamais une star, mais au moins elle reposera à l’endroit de ses rêves… Volant un radeau mais surtout le magot d’un hold-up, la singulière équipe s’embarque dans une périlleuse descente du fleuve, le diable aux trousses. Car non seulement l’agent Sy, flic violent et corrompu, les pourchasse, mais Skunk, un monstre sorti de l’enfer, cherche à leur faire la peau. Quand vous décidez de faire vôtres les rêves d’un autre, ses pires cauchemars peuvent aussi profiter du voyage…

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Les premiers mots

Cet été-là, papa cessa d’électrocuter et de dynamiter les poissons ; il se mit à les empoisonner avec des noix vertes écrasées. La dynamite faisait un sacré barouf et, quelques années plus tôt, une explosion lui avait arraché deux doigts.

 
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Ce que j’en ai pensé

Joe R. Lansdale nous offre ici un roman sombre, glauque et angoissant.

Il nous plonge au cœur des années 30, époque de préjugés et d’intolérance.

-Une fille de couleur et un pédé… Tu traînes décidément avec des gens bizarres.
– La seule chose qui est bizarre, c’est qu’il y ait des gens pour penser que ça l’est.

Lors d’une partie de pêche un peu particulière, le père de Sue Ellen va repêcher un cadavre : c’est celui de May Linn. Sue Ellen et ses amis Terry et Jinx sont sous le choc : qui l’a assassiné? pourquoi? Le côté « je m’en foutiste » du père de Sue Ellen veut remettre le corps à l’eau parce que ça changera rien selon lui! Mais finalement la police est contactée… et le shérif est encore plus désopilant. aucune envie d’enquêter. Affaire classée avant même qu’elle n’ait débuté! Sue Ellen et ses amis sont révoltés par tant de médiocrité. Ils sont jeunes mais déjà désabusés par la vie qui s’offre à eux. Leurs avenirs riment avec misère, tristesse, désœuvrement, douleur… la seule qui avait un but, un rêve, est morte. Ils décident alors de faire une chose complètement folle : récupérer le corps de leur amie, l’incinérer et embarquer ses cendres jusqu’à Hollywood. Une idée complètement loufoque mais aussi périlleuse. Pour arriver à leurs fins, ils ont la « chance » de découvrir le butin d’un casse perpétré par feu le frère de May Linn.


Ils vont alors vivre les pires aventures de leurs courtes vies. Eux qui pensaient vivre déjà un enfer, et que ça ne pouvait pas être pire, vont aller de malchances en malchances (entrecoupés de très courts moments de répits).

L’auteur nous livre ici un portrait de société désopilant et noir. Une atmosphère de haine et de jalousie se dégage. Les personnages auxquels on finit forcément par s’attacher n’ont connu qu’une vie chaotique, violente, peu engageante. Ils ont été, chacun pour des raisons différentes, brimés. Ils sont désabusés et ne croient pas au bonheur (et si vous lisez le livre vous comprendrez que c’est tout à fait logique!). J’ai été épaté par la caractère de Sue Ellen. Elle a une sacrée force de caractère et malgré tout elle est déterminée. Quitte à tout perdre, elle fonce jusqu’au bout. Terry, son ami, est homosexuel et vous imaginez bien qu’au fin fond de la Louisiane à cette époque ce n’est pas évident! Et il y a Jinx, jeune noire pleine d’énergie, qui revendique haut et fort ses droits et qui n’a pas sa langue dans la poche! Les réparties filent du tac au tac avec elle! J’ai trouvé ce trio vraiment bien assorti et complémentaire. Ils savent qu’ils peuvent se serrer les coudes et se faire confiance. D’ailleurs jamais ils ne seraient partis les uns sans les autres.

Autre personnage important du roman : Skunk (Skunk veut dire putois, je vous laisse imaginer l’odeur qu’il laisse à chaque passage). Alors lui, il fait froid dans le dos! Toute une légende accompagne ce personnage. Il vivrait dans les bois, tuerait pour le plaisir et mutilerait ses victimes. Mais voila, ce n’est pas qu’une légende. Malheureusement pour notre trio. Il a été engagé pour les retrouver et les éliminer. Et on peut dire qu’il met du cœur à l’ouvrage. Pendant toute la durée de sa chasse, j’ai frémi pour Sue Ellen et ses amis, j’avais par moment une boule d’angoisse qui se formait dans la gorge. L’impression de sentir la puanteur de Skunk. Je crois que d’ailleurs c’est cette partie du roman que j’ai préféré : je n’avais aucune envie de refermer mon livre avant de savoir ce qui allait se passer. par contre, je dois avouer que même si Skunk semble sortir tout droit de l’Enfer, j’ai eu un peu pitié de lui (ou du moins du pourquoi il a fini par être ce qu’il est). Mais bon ce n’est pas une raison pour avoir envie de le croiser dans les bois près d’une rivière!! Brrr j’en ai froid dans le dos rien que de penser à lui!

Comme je le disais en introduction, ce roman est très sombre et glauque. Les choses sont dites telles qu’elles le sont, brutes sans fioritures (et il faut avoir le cœur bien accroché!). Mais, selon moi, cela colle parfaitement à l’ambiance voulue pour l’auteur. Il ne pouvait tout simplement pas en être autrement.

Par contre, même si j’ai apprécié l’ambiance et le style très agréable à lire de l’auteur, je regrette juste une fin peut être un peu abrupte, comme si c’était une résolution un peu simple de cette course poursuite. Néanmoins, j’ai apprécié la dernière note de mystère des ultimes pages…

En bref…

Un roman inquiétant et sordide, un suspens haletant.

 
denoel

8 réflexions sur “Les enfants de l’eau noire de Joe R. Lansdale

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