Roman historique

La Vie qu’on m’a choisie d’Ellen Marie Wiseman

couv66048365La Vie qu’on m’a choisie

titre original : The life she was given
Autrice : Ellen Marie Wiseman
trad. par Typhaine Ducellier
518 p.
Pocket, 2022
Éditions Faubourg Marigny, 2021

Un soir d’été de 1931, Lilly Blackwood remarque les lumières d’un cirque depuis la fenêtre de sa mansarde. La petite fille a interdiction d’explorer les alentours de Blackwood Manor… Elle n’est même jamais sortie de sa petite chambre. C’est pour sa sécurité, lui répète sa mère, car Lilly fait peur. Mais cette nuit-là, elle est emmenée en dehors de la propriété, pour la première fois. Et elle est vendue au cirque.
Deux décennies plus tard, Julia Blackwood hérite du manoir de ses parents et de leur élevage de chevaux. Elle espère que revenir sur le lieu de son enfance pourra effacer de douloureux souvenirs. Mais elle va découvrir une mansarde jamais ouverte, et les photos d’un cirque mettant en avant une étonnante jeune femme… Au début, le cirque des Frères Barlow n’est qu’une nouvelle prison pour Lilly. Mais au sein de ce monde violent et hétéroclite, Lilly va découvrir la force, l’amitié, et un lien incroyable avec les animaux.
Rapidement, grâce aux éléphants Pepper et JoJo, et à leur dresseur, Cole, Lilly n’est plus seulement une petite attraction, mais le clou du spectacle… jusqu’à la tragédie.
Avec l’histoire de Julia et celle de Lilly, Ellen Marie Wiseman dessine le portrait de deux femmes extraordinaires, très différentes, dans un roman qui nous emporte dans un monde étonnant.
 
cequejenaipensé Ce roman a fait beaucoup parler de lui dans son édition grand format. J’étais très très curieuse de le lire à mon tour et c’est désormais chose faite ! Et quelle lecture bouleversante !
En début d’ouvrage, l’équipe éditoriale explique leur coup de cœur pour cette histoire, pour les émotions qu’ils ont pu vivre aux côtés des personnages. Un préambule qui a encore plus créé d’attente chez moi ! Allais-je ressentir à mon tour ce « tourbillon d’émotions » ? Et la réponse est oui !
Ce roman est exceptionnel et j’ai vraiment eu du mal à le lâcher !
Nous allons suivre le destin de deux femmes à une vingtaine d’année d’intervalles.
En 1931, nous faisons la connaissance de Lilly. Elle a 9 ans et vit recluse dans une petite pièce d’un grenier. Elle n’a pas le droit de sortir. Sa mère est très stricte et méchante. Quand un soir, elle débarque dans sa pièce, l’oblige à s’habiller et l’amène jusqu’au cirque que la petite Lilly a pu apercevoir par sa lucarne. Elle est curieuse mais elle est surtout terrifiée ! Sortir ? mais c’est interdit ! Personne ne doit la voir. D’ailleurs personne à part ses parents ne l’a jamais vu. Et son père, où est-il ?
Et elle avait bien raison de se méfier et d’avoir peur… car sa mère l’a vendu à ce cirque. Un cirque qui a une attraction très prisée : le musée des monstres. Les gens de l’époque méprisaient les gens différents, les rejetaient mais appréciaient ce genre de d’attraction, histoire de ressentir quelques frissons…
Lilly va devoir apprendre vite les codes de son nouveau lieu de vie, cette nouvelle prison, et surtout à affronter les regards des gens. On suivra sa vie avec ses hauts et ses bas sur plusieurs années…
 
Elle fixa longuement son reflet et des larmes lui montèrent aux yeux. Pourquoi est-ce que Maman l’avait-elle retenue prisonnière, enfermée dans le grenier ? Et pourquoi est-ce que Papa l’avait laissée faire ? Est-ce qu’ils la détestaient parce que Dieu avait oublié de lui donner des couleurs ? Était-ce vraiment si terrible ? Et s’ils avaient uniquement voulu la protéger, pourquoi ne pas la laisser aller au rez-de-chaussée ? Pourquoi est-ce qu’ils ne passaient jamais du temps avec elle ? Pourquoi est-ce qu’ils ne l’embrassaient pas, ne la prenaient pas dans leurs bras ?
 
Et en parallèle, nous faisons la connaissance de Julia, en 1956. Quelques années auparavant, elle a fui le carcan familial et surtout l’autorité et les reproches de sa mère. La vie est difficile pour elle. Quand un beau jour, un homme débarque sur son lieu de travail. Sa mère est décédée et elle hérite du manoir de ses parents ainsi que de l’élevage de chevaux qui a fait leur fortune. Sur place, les souvenirs remontent… et pas les meilleurs. Elle va aussi devoir s’affirmer face au gérant de l’écurie qui n’apprécie pas vraiment ses questions. Dans cette grande demeure, Julia va faire remonter ses souvenirs mais aussi découvrir le secret bien enfoui par ses parents…
 
Peut-être qu’elle ne trouvait pas l’accès au grenier car quelqu’un savait qu’elle y découvrirait autre chose que des rats ? Après tout, les greniers étaient comme des musées d’histoire personnelle où les gens conservaient les vestiges du passé. Et parfois, des réponses aux secrets de famille.
 
Menant les deux histoires en parallèle, Ellen Marie Wiseman dresse le portrait de deux jeunes femmes qui ont souffert. On découvre le destin de l’une et il est difficile de mettre des mots sur l’horreur qu’on a pu lui faire vivre (et même si c’est un personnage de fiction, il est fort probable que dans la réalité des faits semblables se soient produits…). J’ai eu l’impression de tisser des liens particuliers avec Lilly. Avec des émotions très partagées… entre l’horreur, l’indignation et la colère de la vie dure qu’elle mène mais aussi des moments heureux où j’ai ressenti du bonheur pour elle car malgré tout, elle a eu la chance de rencontrer des personnes bienveillantes et aimantes et de pouvoir vivre des moments plus doux.
Les parties consacrées à Julia sont moins rudes au niveau des émotions.  Le lecteur comprend très vite qu’il existe un lien entre Lilly et elle. Mais Julia ne le découvre que petit à petit. elle ignore tout de la petite pièce secrète qu’elle va découvrir. Ses premières trouvailles seront des articles de journaux mentionnant le cirque des frères Barlow, notamment des articles sur une jeune femme à la peau très blanche. Julia essaie tant bien que mal de comprendre, de remettre en place les pièces du puzzle. Son père avait-il une maîtresse ? Elle va ressentir un besoin viscéral de comprendre mais il sera difficile d’appréhender la totalité de la vérité car elle n’a que quelques bribes d’informations…
 
À l’exception de Viktor qui l’avait écrasée contre son torse et des deux hommes qui l’avaient maintenue par les bras, on ne l’avait pas touchée depuis qu’elle était toute petite, à l’époque où elle n’arrivait pas encore à se laver ni à s’habiller toute seule. Papa ne lui tenait jamais la main, il ne la serrait jamais dans ses bras et il ne l’embrassait jamais, pas même pour son anniversaire. Quand il lui avait fait la surprise de lui offrir un chaton, elle était si heureuse qu’elle s’était précipitée vers lui pour lui faire un câlin, mais il s’était écarté. Quant à Maman, elle ne la touchait que pour la frapper.
 
Nous nous aurons la chance de voir l’histoire se dévoiler petit à petit. De ressentir ce tourbillon d’émotions annoncé par les éditeurs… Et c’est bien une réalité ! La gorge qui se serre, la colère, le dégoût, la tristesse, le ventre retourné mais aussi les sourires, les moments d’innocence, de joie rares mais intenses.
 
Ce roman m’a transportée dans l’Histoire et dans son histoire. J’ai oublié mon monde moderne, mes repères. L’ambiance est telle qu’on ne se pose pas de questions : on y est. On vit le récit. On ressent les émotions. On soutient comme on peut Lilly et Julia.
 
 

 

Un roman intense : ambiance parfaite, une intrigue captivante, des émotions au rendez-vous et des personnages attachants. N’hésitez pas à le lire à votre tour !
 

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