Roman "jeunes adultes"

Un peu plus près des étoiles de Rachel Corenblit

Un peu plus près des étoiles

Autrice : Rachel Corenblit

248 p.

Bayard, 2019

résumé La fille qui se trouvait en face de moi n’avait plus de visage. Mon père m’avait prévenu : si tu rencontres les patients d’ici, tu ne fais pas de commentaires, tu réagis le plus poliment possible. Tu risques d’être surpris, mais surtout tu es diplomate, tu ne montres rien à ces pauvres gens. Ils ont déjà tellement souffert. Tu vas en croiser pas mal, ici, des abîmés, des malheureux et il y a même un secteur pour les enfants et les grands ados.Hé, cache ta joie, Machin. C’est super romantique comme rencontre. Manque plus que les violons, non ?

cequejenaipensé Ce roman au titre de chanson nous offre un véritable concert d’émotions.

Dix-neuf fois en dix ans. C’est le nombre de déménagement qu’a subi Rémi. Son père est médecin et s’installe là où un confrère est absent pour une plus ou moins longue durée (clinique, hôpital psychiatrique, EPHAD…). Rémi, ado, en a sacré ras-le-bol de ne pas pouvoir poser ses valises plus longtemps, de ne pas pouvoir du coup s’intégrer dans chaque nouveau lycée, de ne pas avoir d’amis. Il n’essaie même plus tellement il est blasé de cette vie que son père lui impose depuis toujours. Cette fois, ils débarquent dans un centre de repos pour personnes en attente de chirurgie réparatrice.

Je ne savais pas encore que j’allais rencontrer les plus belles personnes du monde, du siècle, de ma vie…

Le jour de son arrivé, il tombe nez à nez avec une des « gueules cassées » du centre. Cette fille n’a plus de visage… Rémi a eu droit à la leçon de son père concernant le regard qu’il devrait adopter face à ces personnes mais ses réflexes de dégoûts, de surprise sont les plus forts. et cette fille qui n’a pas de visages a par contre beaucoup de caractère et de réparti. Elle a l’habitude et ne se laisse pas faire. Plus tard, il découvrira que plusieurs des patients du centre, des enfants et des ados de son âge, se retrouvent dans une cabane du parc. Curieux, il observe, s’approche et se retrouve bien malgré lui intégré dans leur groupe, où l a toute sa place. En effet, si lui n’est pas malade ou blessé, il l’est à l’intérieur. Isolé, seul, il s’accroche à une dizaine de cassettes enregistrées par sa mère décédée (d’où les titres musicaux de chaque chapitre : ce roman est un jukebox à hits des années 80 : préparez-vous à chanter pendant votre lecture!!).

Au début de notre lecture, on fait connaissance avec Rémi, un ado paumé, malheureux et en colère contre son père et cette vie qu’il déteste. Sa réaction face à ses ados défigurés reflète, malheureusement, la réaction que la majorité d’entre nous aurait aussi à sa place. Des préjugés, des peurs infondées… A leur contact, son regard fermé évolue vers un regard compréhensif, empathique. En passant par un sentiment de pitié, il va peu à peu réaliser la vie qu’ils ont, les regards et les commentaires qu’ils doivent supporter jour après jour (des gens inconnus comme de leur propre famille) mais aussi de l’angoisse qu’ils ont au quotidien de guérir ou d’attendre la prochaine intervention…

J’ai pris ses mains dans les miennes. Puis je l’ai serré dans mes bras. Pas fort. Ne pas l’étouffer, penser qu’il était fragile. Son corps contre le mien ne pesait pas grand-chose. Et son odeur était un mélange de désinfectant, de médicament, et de chewing-gum à la fraise. J’ai oublié qu’il était tordu. J’ai oublié qu’il était laid. J’ai oublié son visage et sa maladie.

Rachel Corenblit évoque la vie de ses ados « différents » avec beaucoup de sensibilité, de délicatesse et de justesse.  On apprend à les connaître par le regard de Rémi mais pas seulement. Car chacun aura l’occasion de faire entendre sa voix, ses douleurs, ses peurs ainsi que ses rêves. Ce sont tous des écorchés de la vie, de naissance, par accident ou de la vie. Ils sont tous à fleur de peau et nous, lecteurs, absorbons leurs émotions. C’est un roman sur l’amitié, sur l’acceptation de soi et de l’autre, sur la différence, sur l’espoir, sur la vie. C’est un roman beau, savoureux, émouvant, bouleversant. Préparez-vous à verser quelques larmes mais aussi à rire…

C’est ça, le malheur. C’est d’y croire encore même quand on sait que c’est foutu.

en bref C’est un roman beau, tendre, émouvant, bouleversant.

 

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