Et les vivants autour
Autrice : Barbara Abel
497 p.
Pocket, 2021

Comme s’ils n’avaient plus le droit de vivre pour de vrai tant qu’elle était morte pour de faux.
Cela fait quatre ans que la vie de la famille Mercier est en suspens. Quatre ans que l’existence de chacun ne tourne plus qu’autour du corps de Jeanne, vingt-neuf ans. Un corps allongé sur un lit d’hôpital, qui ne donne aucun signe de vie, mais qui est néanmoins bien vivant. Les médecins appellent cela un coma, un état d’éveil non répondant et préconisent, depuis plusieurs mois déjà, l’arrêt des soins. C’est pourquoi, lorsque le professeur Goossens convoque les parents et l’époux de Jeanne pour un entretien, tous redoutent ce qu’ils vont entendre. Ils sont pourtant bien loin d’imaginer ce qui les attend. L’impensable est arrivé. Le dilemme auquel ils sont confrontés est totalement insensé et la famille de Jeanne, en apparence si soudée, commence à se déchirer autour du corps de la jeune femme…
Gilbert referme doucement la porte derrière lui. Il s’avance de quelques pas vers le centre de la pièce, retenant son souffle comme s’il cherchait à dissimuler sa présence. L’obscurité l’empêche de distinguer les contours de cette chambre dont il connaît pourtant les proportions par cœur.

La famille de Jeanne était jusqu’à là soudée, du moins en apparence. La décision qu’ils vont devoir prendre maintenant mais à jour les ressentis, les rancœurs, les regrets de chacun.
Alors si, aujourd’hui, elle pouvait enfin lui annoncer une bonne nouvelle…Ce serait merveilleux, un peu comme si la vie prenait le pas sur la mort. Comme si elle lui damait le pion, inversant la spirale que le destin de Jeanne a imposée à leurs vies.
Voilà quatre ans que l’ombre de sa soeur plane sur eux. Comme s’ils n’avaient plus le droit de vivre » pour de vrai » tant qu’elle-même était morte » pour de faux ».
Peut être faut-il affronter la mort en face pour permettre à la vie de s’imposer enfin?
Barbara Abel va alors s’attarder sur chaque personne qui a un rôle phare dans la vie de Jeanne. Son père, un chef d’entreprise ambitieux. Il adore sa fille mais la voir dans cet état lui est insupportable. La « nouvelle » va l’assommer. On le voit évoluer au sein de son entreprise, entre autre, et on découvre un personnage assez détestable, autoritaire et qui ne s’embarrasse pas de bienveillance… La mère qui s’est donné corps et âme à son foyer et à l’éducation de ses filles. Soumise à son mari, elle n’est visiblement plus heureuse dans ce rôle. La sœur est en train de vivre un tournant dans sa vie de couple… et sa sœur lui vole encore la vedette. Elle s’est toujours comparée à elle. Et enfin le mari, qui après 4 ans, s’autorise enfin à envisager d’aller de l’avant…
Après le départ des filles, Micheline a réalisé que le monde lui-même avait tellement changé qu’elle ne le reconnaissait plus. Il lui semblait être une naufragée sur une terre inconnue dont elle ne possédait plus les codes.
Et puis Jeanne est tombée dans le coma.
Ce roman, au delà de l’enquête qui a lieu en arrière plan, est l’occasion de mettre en avant la part d’ombre de chacun, la vérité de chacun. Il y a le visage que l’on offre, la façon dont les autres veulent nous percevoir et le jardin secret, les non dits. Certains des personnages vont montrer un visage plutôt machiavélique. Oui certaines de leurs pensées, de leurs réactions font véritablement froid dans le dos. La vengeance, la jalousie et la peur sont des moteurs terribles.
L’ambiance du roman est sombre et s’attarde principalement sur la psychologie des personnages. Le fait principal, le déclencheur, passe en second plan (même si on aura la réponse, mais l’autrice s’en sert surtout de levier pour décortiquer l’âme humaine. D’ailleurs, en exergue, elle explique qu’elle s’est inspiré d’un faits réels bien qu’incroyable. J’ai apprécié son écriture, ses portraits et le regard qu’elle porte sur les différents personnages. Elle en profite aussi pour implicitement nous questionner sur notre propre réaction si on était dans la situation de la famille Mercier.
Depuis le temps que je voulais lire un roman de Barbara Abel, je suis sous le charme et je compte bien continuer à piocher dans sa bibliographie !!

J’aime beaucoup les romans de Barbara Abel, justement par sa capacité à exploiter la part d’ombre, voire de folie, de chacun. J’ai bien aimé celui-ci d’ailleurs !
Je suis très curieuse d’en lire d’autres d’elle! Notamment « Je sais pas » !
J’avais bien aimé Je sais pas !
Il faut que je le lise celui-ci !!