Le Dernier Péché
Titre original : Den åttonde dödssynden
Auteure : Rebecka Aldén
trad. du suédois par Lucas Messmer
363 p.
Denoël, 2017 (Sueurs froides)
Vous pensiez qu’il n’existait que sept péchés capitaux? Voici le huitième, et il est redoutable… Brillante auteure et conférencière, Nora sait convaincre son public que le bonheur et la réussite sont à la portée de chacun, pour peu que l’on s’en donne la peine. Ce bonheur, elle a décidé de le construire après son accident, survenu dix ans plus tôt lorsqu’elle est tombée du septième étage et a miraculeusement survécu. Elle vit à présent avec son mari, Frank, qui est aussi son agent, et leurs deux enfants, dans un quartier résidentiel cossu. Une fois par an, Nora organise pour tout le voisinage une somptueuse fête où elle joue à merveille son rôle d’hôtesse. Mais ce tableau idyllique est un jour bousculé par l’arrivée de Klara, qui s’installe dans la maison d’en face. Alors que Nora s’attaque à son prochain best-seller – un roman sur les sept péchés capitaux –, Klara se montre une voisine de plus en plus présente. Charmante et gaie, elle séduit tout le monde. Seule Nora ressent un profond malaise. Petit à petit, des fragments de son passé lui reviennent et un soupçon se met à la hanter : et si cette chute, dix ans plus tôt, n’avait pas été accidentelle?
– Croquez-vous la vie à pleines dents? Profitez-vous de chaque jur qui passe ? Etes-vous conscients de ce que vous possédez ? et comment réagiriez-vous si vous perdiez tout ? Je m’appelle Nora Lindqvist et je suis ici pour vous apprendre à ne pas passer à côté de votre vie.
Le Dernier Péché est le premier roman – très prometteur – de Rebecka Aldén, journaliste et rédactrice en chef du magazine féminin suédois Damernas Värld. Et je peux vous dire que pour un premier roman, l’auteure tape fort! L’intrigue est maîtrisée de bout en bout, construite, réfléchie, surprenante. Le style est assuré. Les personnages complexes.
Le personnage principale, Nora, est une jeune femme accomplie, qui mène une carrière brillante. Elle a écrit de nombreux livres de développement personnel sur le bonheur et le bien-être, mène des conférences à succès. Mère de famille, elle semble heureuse, comblée. Mais tout n’a pas été rose dans sa vie. Dix ans plutôt, suite à une énorme dispute avec son mari, elle est tombée dans une cage d’escalier… elle a dégringolé de sept étages et elle a survécu miraculeusement. Personne ne croyait qu’elle remarcherait un jour. Mais sa volonté de se remettre à marcher a été la plus forte. Cette volonté, cette détermination, ce changement de vie a été salvateur et elle en fait une vraie philosophie de vie et a décidé de transmettre en quelque sorte la « bonne parole ». Son mari est devenu son agent. Seul ombre au tableau de cette réussite… ses enfants. Problèmes de communication semble-t-il. Nora est une personne qui est tout dans le contrôle, tout est réfléchi et calculé : sa façon d’être, son image, sa famille. Comme si elle avait peur de perdre une nouvelle fois cette vie qui a déjà failli lui glisser entre les doigts. Malheureusement cette image qu’elle essaie de donner d’elle même est souvent mal interprétée. Son voisinage la trouve austère, froide voire arrogante. Surchargée de boulot, elle s’isole de plus en plus pour travailler à son nouvel ouvrage consacré aux sept péchés capitaux, ou plutôt comment ne pas céder à ses péchés pour atteindre une vie saine et sereine. Et le thème de cet ouvrage n’est pas anodin, on le comprend au fil de la lecture qui est étroitement liée à ces différents concepts.
Tout l’équilibre qu’elle se démène à conserver va être perturbé par l’arrivée de la nouvelle voisine : Karla. Les enfants l’adorent, les voisins sont sous le charme, son mari aussi… seule Nora ressent un terrible malaise en sa présence. Cette femme a une aura envoûtante, perturbante. Nora qui est tout le temps dans le contrôle perd littéralement ses moyens dès qu’elle est en sa présence. Elle bafouille, se sent maladroite. Ses sens sont en alerte mais elle n’arrive pas à mettre le doigt sur ce qui cloche. Qui est cette femme? Est-elle vraiment mauvaise? une psychopathe? Est-ce Nora qui se fait un film ?
Klara. C’était elle, la racine du mal.
Le lecteur ressent ce malaise grandissant. L’atmosphère s’alourdit peu à peu, devient oppressante. Nora est de plus en plus isolée, elle frôle la folie, et son passif ne l’aide pas à rester sereine. Hallucinations, paranoïa, surmenage réalité… on est pris dans le tourbillon de ses doutes, de ses impressions, de ses émotions. La limite entre réalité et folie semble très mince.
Rebecka Aldén construit ce récit volontairement en symétrie avec son intrigue. Le début est cadré, structuré et plus le doute et la folie s’installe dans le cœur de son personnage, plus l’intrigue se corse, se mélange. Le lecteur est hypnotisé par les mots, par les sensations, le malaise grandissant. On ne sait plus sur quel pied danser. Ni à qui se fier. Et cette fin? Je me doutais bien que les apparences pouvaient tromper mais à ce point là? Quelle morale retenir : l’apparence avant tout? A vous de juger!
L’heure était venue de tirer une leçon de ses propres livres. De reprendre les rênes de sa vie.
Cependant, même si j’étais happée par le style et l’intrigue, il me faut bien avouer qu’il me manque quelques réponses pour être pleinement satisfaite de ma lecture.
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