
Léo, un adolescent sans parents et sans domicile, qui traîne avec son chien dans les rues de Paris, a la capacité de la repérer. Il distingue une espèce de masse floue qui traverse les matières. Le nombre de victimes grimpe en flèche dès que Léo rencontre Cosmina. Une fille aussi perdue que lui. Tous les deux se collent l’un à l’autre pour échapper aux mâchoires de la Bête.
Ce qu’elle a dévoré en premier, personne ne le sait.Des micro-organismes, probablement. Des amibes ou des bactéries. Avant de s’attaquer à des parasites tels que les acariens, les poux, les puces.
Puis des moustiques. Puis des mouches et des araignées. Puis des cafards.
A moins qu’elle n’ait commencé par se nourrir de plancton, car elle pourrait avoir une origine aquatique, selon ceux qui la prennent pour Godzilla.
Au conditionnel, évidemment, car tout ça ne reste que des suppositions.

Une chose, une entité semble avoir établie ses quartiers dans Paris. Elle dévore tout sur son passage. Sans doute a-t-elle commencé par des insectes et personne n’a remarqué ou en tout cas personne ne s’est plaint. Puis ce fût le tour des rats, puis des chats. Là les gens ont commencé à réagir, à porter plainte pour disparitions inquiétantes. Ce fût le tour des chiens. Des bébés… Là forcément la chose a pris de l’ampleur. Les médias, la police s’en mêle. Que se passe-t-il ?
On ne pouvait pas encore imaginer. C’était impossible. Même dans nos plus épouvantables fantasmagories. C’était trop tôt. Même si tout laissait déjà craindre le pire, de la pollution au réchauffement climatique en passant par les centrales nucléaires, les catastrophes étaient envisageables. Mais pas ça. On ne pouvait pas soupçonner son existence avant de voir le sang couler.
Dans tout ça, il n’y a qu’un seul témoin. Ou en tout cas, il est le seul à apercevoir celle qu’on surnomme la Bête. Ce témoin c’est Léo, un ado paumé, sans parents et sans domicile. Pourquoi est-il le seul à la voir? et surtout ce qu’il voit est tellement incroyable que personne ne semble se fier à ces observations. Seule Cosima, une ado qui vit dans la rue avec sa famille comme lui, semble le croire. Il faut dire que ce n’est pas évident pour lui d’expliquer ce qu’il aperçoit, d’autant plus que cette bête semble grandir de façon exponentielle, tout comme sa faim… Quel est son but ? Va-t-elle s’arrêter un jour ?
Guillaume Guéraud met en place son décor, ses personnages et surtout le sentiment d’angoisse. On se transporte dans ces lieux, on visualise les scènes de disparition, la terreur monte, s’installe, l’angoisse, les questions… La Bête est invisible mais l’auteur réussit si bien à décrire ce qu’il se passe qu’on a quand même l’impression d’assister aux scènes, de la voir faire disparaître ses victimes. La chair de poule est bien là sur nous et on ne peut que dévorer (à notre tour) ce roman pour comprendre, pour savoir jusqu’où ça va aller, si Léo et Cosima (et Tcheckov le chien!)vont s’en sortir ou s’ils feront parti des victimes eux aussi… Le récit est toujours en mouvement, en action… comme si une course contre la montre, contre la Bête était engagée.
Dans ce roman, il n’y pourtant pas que cette peur et cette chose. Il y a aussi Léo et Cosima, deux êtres en devenir, qui doivent déjà survivre au quotidien, faire avec le peu qu’ils ont pour se construire une vie, et peut-être un avenir… peut-être ensemble d’ailleurs.
« Cosmina » murmura t-il. Il n’avait jamais entendu ce prénom, mais il l’associa au cosmos et tira des plans sur la comète.
L’écriture de Guillaume Guéraud est toujours aussi riche et dense quand il s’agit de ses romans ados. Ce roman m’a rappelé ce que j’avais pu ressentir lors de ma lecture de l’angoissant Plus de morts que de vivants. Cette tension qui monte crescendo, ce besoin de se rassurer pour les personnages. L’écriture est vive, incisive, brute et douce. Toujours avec les références à la culture cinématographique que l’auteur affectionne tant.
Un roman à la fois beau et dur, qui fait peur, vibrer, qui angoisse… Une lecture dévorante !