La Mort de Mrs Westaway
titre original : The death of Mrs Westaway
Autrice : Ruth Ware
trad. de l’anglais par Héloïse Esquié
510 p.
Pocket, 2021

En effet, Harriet doit de l’argent, beaucoup d’argent, emprunté à un usurier sans scrupules, et cela risque fort de mettre sa vie en danger. Seul souci : ses grands-parents sont décédés vingt ans auparavant, et elle ne les a même jamais connus. La lettre a donc été adressée à la mauvaise personne.
Mais Harriet qui gagne sa vie en tirant les cartes pour prédire l’avenir n’est plus à une affabulation près.
Et ce coup du sort pourrait enfin tout résoudre sauf si le hasard en décide autrement…
Les pies sont de retour. Ah, ce que je les ai détestées, la première fois que je suis arrivée à la maison, ça me fait bizarre d’y repenser. Je me rappelle, je remontais l’allée dans le taxi, en venant de la gare, quand je les ai vues alignées comme ça le long du mur du jardin, en train de lisser leurs plumes.

Harriet ou Hal, notre héroïne, est prise à la gorge. Elle vivote avec ses maigres revenus qu’elle gagne en tant que cartomancienne. Alors que les créanciers la menace pour récupérer leur dû, une lettre d’un notaire lui apprend que sa grand-mère vient de décéder et qu’elle doit se rendre sur place pour l’enterrement et la lecture du testament. Or, visiblement le notaire se trompe. Sa mère se nommait bien Westaway mais ne portait pas le bon prénom. Et pour elle, ses grands-parents sont décédés depuis longtemps. En se renseignant sur cette famille, elle se rend compte que cet héritage pourrait la sauver au moins pendant un temps et éponger ses dettes. Mal à l’aise, elle décide d’y aller et de peut-être profiter de ce malentendu.
Elle avait découvert que les vérités les plus importantes résidaient souvent dans ce que les gens ne disaient pas et appris à détecter les secrets qu’ils cachaient au vu et au su de tous ; dans leur attitude, leurs vêtements, et les expressions qui passaient fugacement sur leurs visages quand ils pensaient que tout le monde avait le dos tourné.
Une fois sur place, elle découvre un lieu sinistre, des oncles et cousins à la fois envahissants et prévenants et surtout elle découvre une famille en crise, peu attristée par la perte d’une grand-mère qui semblait tyrannique. L’héritage va se révéler plus important que prévu et Hal se retrouvera coincer par ce mensonge qui semblait anodin et qui prend une ampleur dont elle ne sait pas trop se dépêtrer. Surtout que même si l’ambiance est froide dans cette grande demeure, ses oncles sont (pour la plupart) plutôt attentionnés avec elle. Pour elle qui est seule depuis la mort de sa mère et qui n’a jamais vraiment eu de familles, cet accueil est plutôt agréable.
J’ai vraiment aimé le personnage de Hal qui vu qu’elle imagine mettre la main sur un héritage qui ne lui est pas destiné pourrait être une femme cupide, manipulatrice et peu agréable est en réalité tout le contraire. On la sent timide, fragile. Elle culpabilise assez vite par rapport à son projet initial. Et elle va chercher à comprendre cette famille, et elle va découvrir que même si elle n’est pas la bonne petite-fille, son histoire est quand même liée à cette famille. Un conflit a eu lieu entre certains membres de celle-ci et ce testament est loin d’être innocent. Alors elle va essayer de comprendre qui était sa mère, ce qu’est devenu la sœur de ses oncles, pourquoi elle a disparu sans donner d’explications, sans jamais leur redonner des nouvelles. Et si elle était encore vivante ?
La demeure des Westaway est imposante, lugubre, froide, mal isolée et elle m’a semblé digne d’un bon récit d’horreur. Surtout avec la présence sinistre de la vieille gouvernante qui surgit en silence, qui semble tout savoir, et qui fait régner l’ordre à la baguette! Très sympathique cette dame !!
Ruth Ware a soigné son décore et son ambiance avec beaucoup de soin. Un huis-clos familial tendu à cause du lieu qui déteint sur les humeurs de chacun qui préférerait être partout ailleurs que là. Le lecteur se retrouve lui aussi piégé dans ce lieu, ressent le malaise ambiant, mais, tout comme Hal, a envie de savoir ce qu’il a pu se passer dans cette famille. Au fur et à mesure des conversations et des passages de journaux intimes qu’on découvre entre quelques chapitres, des pistes prennent forme. On imagine, on devine. Ou du moins une vérité est en train de se dessiner mais l’autrice saura néanmoins nous surprendre jusqu’au bout.
La Mort de Mrs Westaway a été pour moi une lecture bien prenante. J’ai adoré l’ambiance. Les personnages apportent tous quelque chose à l’intrigue et nourrissent les relations humaines de cette histoire. Qu’ils soient avenants, taciturnes, râleurs ou attachants, je crois que j’ai aimé toute cette galerie de personnages qui prennent vie avec les mots de l’autrice.

De la même autrice, je vous conseille aussi La Disparue de la cabine n°10